Consultant métier de ouf – Partie 1/7 – Devenir consultant…pour ou contre ?

Devenir consultant ? Est-ce bien sérieux…?

Introduction : Une histoire expresse du consulting (parce que le consultant est rapide, surtout pour facturer)

C’est Charles, le freelance désespéré, blog aujourd’hui disparu qui a identifié le premier consultant de l’histoire, après des recherches méthodiques et une bonne bière : Socrate !

Et ce n’est pas stupide du tout considérant que :

  1. Son but était d’aider les gens à s’améliorer alors qu’il n’a jamais fait la démonstration qu’il en était capable;
  2. Il passait son temps à poser une tonne de questions, à tout bout de champs;
  3. Lorsqu’on l’interrogeait sur quelque chose d’un peu trop précis il répondait soit par une question, soit en disant «Tout ce que je sais, c’est que je ne sais pas» ;
  4. Il laissait toujours ses «clients»parler les premiers, ainsi il n’a jamais été attrapé en flagrant délit de dire des âneries ;
  5. Il était trop fainéant pour écrire, il a donc laissé à son stagiaire, un certain Platon, le soin de dactylographier au burin les rapports des focus groupes qu’il organisait;
  6. Il a commencé à utiliser des termes incompréhensibles pour le commun des mortels, comme «dialectique» ;
  7. Il utilisait beaucoup de mots en langue étrangère pour paraître plus intelligent qu’il ne l’était et rendre ses auditeurs confus afin de les garder sous sa domination;
  8. Il avait beaucoup de détracteurs affirmant qu’il était un charlatan aux idées bizarres. Il a d’ailleurs été tué par eux car il n’avait pas de blog ni de compte Twitter avec assez de followers pour signer des pétitions online ou organiser des flashmobs de protestation;

La seule différence entre Socrate et un consultant moderne c’est qu’on ne sait pas s’il était payé pour ses services. Soit il a oublié d’y penser, le distrait, soit le montant de ses honoraires s’est perdu.

Pour trouver un autre consultant aussi célèbre, il faudra attendre le début du XVIeavec Leonard de Vinci. Premier consultant international qui comptait des princes régnants et des rois parmi ses clients. Ce qui évite toujours les problèmes de mauvais payeurs et de trésorerie.

Selon certains, il se serait inspiré de ses contemporains pour ses travauxet le Codexserait en fait une agrégation de ce savoir pillé chez les autres. Ce qui ferait du Codexle premier blog de l’histoire. Avouez que cette info vaut bien le prix de ce bouquin !

Passons rapidement sur les Eminences Grises de Louis XIII et les courtiers de Louis XIV. Métiers plus ou moins indépendants qui demandaient d’avoir une véritable culture de réseau pour trouver des clients. Avec une espérance de vie de 35 ans, mieux valait ne pas faire d’études trop poussées, cela n’aurait pas laissé beaucoup de temps pour cumuler des trimestres d’une retraite aussi courte que méritée.

Arrive enfin le début du XXesiècle et Frederick Tayloravec son livre : Principles of Scientific Management. C’est en 1913 qu’il connaît son apogée professionnelle avec les premières applications de ses théories par Ford. Il utilisa pour la première fois cette phrase reprise par des millions de consultants : « Nous plaçons l’être humain au centre de l’organisation ». Bon, avec des chaînes et des cadences imposées mais au centre, ça compte non ?

Taylor ne vit pas se réaliser son rêve de transformer les hommes en moyens de production « qui respirent »car malheureusement il décéda en 1915. Sans savoir qui avait gagné la partie commencée en 1914 d’ailleurs.

Et nous voilà dans l’ère moderne avec les entreprise de Consulting comme Bain, McKinsey, Boston Consulting Group, Andersen et consorts et leurs armées de zombies en costume gris, chemise bleue et cravate à rayures.

Voilà l’ère des gourous, de Peter Drucker à Seth Godin aux US, de Henri Fayol à Hervé Sérieyx en France ou de Max Weber à Joseph Goebbels en Allemagne.

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1      Devenir consultant ? La liberté de l’auto-esclavage 

 1.1     10 bonnes raisons pour devenir consultant

T’as tout compris, devenir consultant c’est un rêve qui devient réalité mais qui ne va pas te réconcilier avec ton beau-frère qui est banquier (ou fonctionnaire)Il faut le reconnaître, il y a quand même des métiers plus durs ou plus stupides. Voici donc quelques raisons positives de devenir consultant.

1 – Prendre sa vie en main

Le travail salarié ne semble pas aller dans le sens de l’Histoire. Depuis les 35 heures (période bénie pour les métiers du conseil),les entreprises nous parlent d’employabilité mais elles nous encouragent cependant à prendre notre carrière en main car elles n’ont plus aucune visibilité sur l’avenir. Ne pense pas que ta performance, même répétée, ou ta compétence, même reconnue, sont les moyens de sécuriser ton job. Dans les années 70, dans le nord de la France, il y avait plein de mineurs très performants et très compétents.

2 – Ne pas se fatiguer l’esprit

Tant que tu ne rentres pas dans la catégorie des « experts », il te suffira d’appliquer des procédures ou des idées que tu auras trouvées dans les bouquins que tes clients ont oubliés (de lire). Tu pourras aussi reprendre les procédures que tu utilisais dans ton entreprise précédente et qui seront up to date lorsque tu les auras traduites en anglais : competency framework, life management, e-business, social learning, etc. En plus, en appliquant les mêmes process d’une entreprise à l’autre, tu pourras te rendre chez ton client les mains dans les poches. S’il te demande de résoudre un problème nouveau, saches que ce n’est pas toi qui possède les solutions mais les salariés de ton client bien sûr ! Et heureusement pour toi car tu es le seul à les écouter.

Bottom-line(profites-en pour apprendre le jargon) : tu diras aux autres ce qu’ils doivent faire tout en évitant de faire le travail toi-même. Enjolive la vérité, trouve une explication foireuse que tu pourras étayer par des chiffres si tes erreurs commencent à se voir et écris sans faute d’orthographe : voilà les seules compétences dont tu as vraiment besoin pour commencer.

3 – Travailler si tu veux quand tu veux avec qui tu veux où tu veux, mon neveu

Te voilà maître de ton agenda. Pas envie de te lever : dis à ton client que tu as la grippe. Ce sont les soldes : préviens que tu dois terminer un dossier urgent pour le ministère de l’Intérieur. Une flemme passagère : invente une intervention à l’étranger dans une ville au nom exotique.

Si tu es un aficionadodes réseaux sociaux, tu pourras te connecter quand tu veux, actualiser ton profil Facebook 10 fois par jour ou écrire une centaine de tweets en y passant la journée sans avoir à te planquer pour le faire comme un simple salarié.

Tu changeras de lieu de travail tous les jours et d’activités toutes les 10 minutes.

Au moins, pas de routine !

Et si tu arrives à faire partie des consultants les plus occupés, les rares qui parviennent à avoir une activité stable d’un mois sur l’autre, tu pourras même avoir le luxe de choisir tes clients. Ce qui n’a pas de prix.

4 – Ne plus perdre son temps à être « sympa »

Tu pourras t’amuser à changer de personnalité en fonction de la situation, du secteur d’activité de ton client ou de son niveau hiérarchique. Avec une règle : plus ton interlocuteur est haut dans la hiérarchie, plus tu pourras te permettre d’être hautain. Les directeurs deviendront tes assistants et leurs assistants tes meilleurs amis. Tu seras même payé pour ça.

Rassures-toi, tu n’auras toujours pas besoin de devenir copain avec ton beau-frère. Mais si, tu sais bien, celui qui a un job tous les jours de8h à 17h dans une banque.Celui qui tient ce travail stable qui le fait passer pour le gendre parfait auprès de tes propres parents. Alors que toi regarde-toidans un miroir. Consultant? Indépendant ? Freelance ? Tu devrais essayer d’avoir un job dont l’intitulé n’est pas en anglais !

De toute façon, personne dans ta famille ne comprendra ton métier. Consultant en philanthropie ? Spécialiste en réseaux sociaux verticaux ? Expert en intergénérationnel ou en Transmédia?

Allo ? Tout ce qu’ils verront pour mesurer l’intérêt de ton job et ta réussite…c’est ta bagnole:Alors changes-tu de Béhème tous les ans ou conduis-tu la même 306 diesel depuis des années ?

5 – Arrêter de porter une cravate et ne plus se raser tous les jours

Sans doute un tout petit avantage, et qui ne te concerne pas si tu t’appelles Janine.

Une fois établi comme consultant tu deviens un « expert » (voire un gourou si suffisamment de monde dit que tu l’es, mais fais gaffe quand même) et pour un expert, à moins d’avoir plus de 35 ans et d’être conseiller financier, porter une cravate pourrait même être décrédibilisant. En entreprise, la cravate est un signe de pouvoir et d’appartenance à une communauté.

En devenant indépendant, une cravate n’estplus un accessoire, c’est un élément de ta « stratégie de présence » oude »marque personnelle ».C’est à dire que c’est un accessoire participant à l’image que tu souhaitesdonner à tes clients.

Une cravate te donnera le style « docteur », sérieux et professionnel. D’un autre côté ; ne pas porter de cravate te donnera l’image de celui dont le succès permet de sortir des conventions.

Fait attention quand même à pas te faire passer pour un artiste. Tu es consultant, tu es là pour faire du pognon, pas changer le monde ! En tout cas, ne pas avoir de cravate est le signe de ton « assertiveness ».

Exercice 1 : Expliquer assertiveness et faire un schéma sous PowerPoint les yeux bandés.

Exercice 2 : Teste ta crédibilité dans la non-hiérarchie du travailleur indépendant en te rendant chez ton client en Tong.

6 – Etre en avance sur ton temps

C’est d’autant plus vrai car tu n’as pas le choix : tu dois rester devant tes concurrents. Fini les tâches d’exécutant à réaliser dans un cadre d’horaires fixes et extensibles (les horaires d’un salarié sont fixes car il n’a pas le droit de les réduire, mais ils sont aussi extensibles car il est obligé de les prolonger).

Ton temps est désormais consacré à lire, réfléchir et apprendre, pas à courir après le résultat tout en faisant de la stratégie politique auprès de tes supérieurs pour être sûr d’intégrer la liste des promus à qui l’on propose davantage de salaire pour moins de travail.

Etre consultant, c’est devenir un étudiant à vie. Enfin, t’emballes pas non plus. La formation tout au long de la vie c’est pour les salariés ! Toi ça risque plutôt d’être la retraite tout au long de ta vie si tu es nul en commercial.

7 – Détenir le pouvoir

Voir ton client devenir blême en apprenant que ses salariés ne rêvent que de partir à la concurrence après avoir mis le feu à sa voiture n’a pas de prix. Lui apprendre que la seule chose qui les retienne n’est pas son « management de proximité »mais le fait qu’ils se sont endettés sur 20 ans pour une « maison à proximité » est un plaisir tout aussi délicat.

Tu pourras aussi décider de venir à l’heure de ton choix en demandant à ton client de s’adapter à ton agenda et parfois le faire attendre sans même avoir besoin de t’excuser. Si tu es en retard, c’est que c’était important bien sûr. Bon, il faut reconnaître que si tu roules en Porsche ou que tu as la dernière moto à la mode cela risque de devenir difficile d’arriver en retard.

8 – Avoir son nom partout

Si tu as choisi de devenir consultant par manque de reconnaissance, tu pourras googliser ton nom chaque jour et voir le nombre de hits augmenter régulièrement. Tu pourras aussi faire de l’egosurf pour en suivre l’évolution ou écrire un bouquin uniquement dans le but d’avoir davantage de résultats sur Google ou Duckduckgo !  Lorsque par la suite tu auras compris que pour faire du buzz- c’est-à-dire devenir viral- tu adapteras ton discours au support que tu utiliseras. Ainsi tu parleras de ton blog dans ton blog, de twitter sur twitter, et de Facebook sur Facebook.Ensuite tu pourras panacher :tu parleras de ton blog sur Twitter, tu posteras tes tweets sur ton profil Facebook, tu utiliseras ton Facebook pour encenser ton blog, etc., etc.

9 – Disposer d’une perspective inédite sur les choses

En devenant freelance, tu sors de l’aquarium (ou du panier de crabe, faut voir) qu’est l’entreprise. Ce qui signifie que tu peux maintenant voir le bocal de l’extérieur. C’est plus facile d’observer les choses quand on n’est plus partie prenante, non ? Tu vas pouvoir mettre ton énergie à l’œuvre pour faire autre chose que du lobbying auprès de la DRH pour avoir un bureau avec une vue sur l’extérieur, une bonne place de parking ou des vacances aux dates de ton choix. Tu vas pouvoir faire autre chose de ton temps que de chercher à revenir dans les bonnes grâces de ton manager qui a appris que tu couchais avec sa femme/son mari/sa fille/son fils (tu as été dénoncé par sa secrétaire qui est jalouse). Tu auras également plus de temps pour humer l’air du temps et regarder la télé, analyser les tendances de ton secteur, imaginer de nouveaux services à vendre. Bref, tu n’auras plus à répondre en courant aux demandes de ton boss qui se croyait drôle en ponctuant ses ordres d‘un tonitruant « j’en ai besoin pour hier ».

10 – Te donner bonne conscience et faire un métier passionnant qui se réinvente chaque jour. Ah ah… 

En étant consultant tu vas gagner plus d’argent que le salarié moyen. Tu assassineras tes clients avec des honoraires répétitifs absolument déraisonnables basés sur une grille de tarifs que toi seul comprendras. Tu pourras demander des frais quotidiens correspondant au salaire mensuel de la plupart des personnes que tu rencontreras dans l’entreprise tout en décidant de venir en costume Armani, en tailleur Kenzo ouenjean-baskets. Comment ? Tu es consultant et tu n’as pas retrouvé ton niveau de salaire précédent ? C’est sans doute parce que tu as dû embaucher ta mère pour faire la facturation et que certaines factures n’ont pas été envoyées…

Sans oublier que :

– Tu pourras être recruté par l’un de tes clients à tout moment.
– Tu seras invité à déjeuner dans des restaurants correspondants à l’image que tes clients ont de toi. Un big Mac à emporter devra t’alerter.
– On te sortira le tapis rouge et les dirigeants se tairont pour t’écouter, bon sauf si tu es un « facilitateur ». Dans ce cas il faudra que tu apprennes à faire parler les autres.
– Tu pourras faire tes courses en dehors du monde salarié et échapper à la cohue du soir et du samedi.
– Tu pourras travailler au moment où tu te sens le plus productif, sans doute après 18h00.
– Tu pourras adapter tes honoraires en fonction de la situation de tes clients et aider à changer les choses à ta manière. Ce qui sera aussi utile pour ton âme que pour ton portefeuille.
– Tu n’auras plus de compte à rendre pour ton évaluation annuelle ni pour tes dates de vacances. C’est ton conjoint qui fera l’évaluation et décidera de te garder ou pas, et tes enfants choisiront les vacances.
– Tu pourras utiliser ton Mac avec Firefox sans qu’un règlement de confidentialité ou de sécurité ne t’en empêche. En plus, tu auras une bonne excuse pour acheter un iphone ou un Blackberry qui te permettront de rester en contact « avec ce qui se passe ».
– Tu apprendras à prendre du recul pour supporter, voire apprécier la connerie des autres.

En résumé

Selon l’image d’Épinal, être indépendant, c’est d’abord dire merde au système, être maître de son agenda, ne plus demander de vacances à qui que ce soit. Bref : le bonheur !
Ouais…, « en première lecture » pour reprendre une tournure de consultant, mais ne t’emballe pas… c’est pas fini !

1.2      10 bonnes raisons pour ne pas devenir consultant

Devenir consultant ? Va plutôt faire du Vélib sur l’autoroute ! Il faut reconnaître qu’en France le métier de consultant fait encore « un peu » rêver. Mais la médaille a son revers et ton travail peut vite devenir ton addiction.

1 – Le travail 7 jours sur 7

 Il y a de fortes chances que tu te retrouves rapidement esclave de ton ordinateur, enchaîné à un tableau Excel pour une analyse ou à PowerPoint pour une présentation. Là, ce sera à toi de jouer, bicoze plus d’assistante, et comme ton avenir dépend de la qualité de ton travail tu ne seras jamais satisfait. Beaucoup de freelance ont du mal à se ménager des plages séparées entre travail et repos et finissent souvent par travailler jusqu’à épuisement. Donc, prévois un budget Nespresso et Guronzan !

2 – Sauf si tu ne fous rien

L’autre réalité est que si l’automotivation, le dépassement de soi et la résilience (capacité à rebondir après un échec) ne font pas partie de ton vocabulaire, tu commenceras ta journée par faire une sieste, regarder le dernier épisode de Desperate Housewives ou de Dexter que tu auras téléchargé pendant la nuit, flâner autour d’un café après avoir déposé tes enfants à l’école. Bref, c’est très facile de ne rien foutre ou de se perdre dans les méandres des réseaux sociaux quand on n’a pas d’objectif (ni de clients).

3 – Plus de congés payés mais le chômage technique

Quand ton salaire dépend du nombre de journées facturées, prendre un jour de congé peut coûter très cher ! Tu profiteras donc de quelques jours entre deux missions et tu prendras tes vacances quand tes clients sont en vacances où trop occupés pour s’occuper de toi. Tu vas ainsi te retrouver en vacances aux mêmes périodes que les salariés !

Prévois de trouver à t’occuper en février, mai, juillet et août. Des périodes de chômage technique très propices à l’écriture d’un bouquin que seuls tes concurrents et amis consultants auront le temps de lire pour se rassurer que tu ne sais pas plus de choses qu’eux.

4 – Tout faire… tout seul

De ta marque personnelle – j’y reviendrai plus loin – à l’administratif, tout est désormais à ta charge. Et en France, de l’administratif tu auras ! A moins d’avoir dès le départ les moyens de faire appel à un professionnel, tu devras en plus de ton travail de conseil, te palucher ta compta, les bilans pédagogiques si tu as un numéro de formateur, etc.

5 – Plein de temps libre… pour être seul chez toi

Dans la journée, tous tes amis travaillent car il y a peu de chance qu’en devenant freelance tu restes ami avec ceux qui le sont aussi. Alors certes, tu as la liberté d’aller déjeuner avec eux pour écouter leurs tristes vies de salariés, de passer quelques appels à tes clients ou de rencontrer d’autres consultants aussi désœuvrés que toi. Mais la plupart du temps, tu te sentiras bien seul(e). Enfin, jusqu’à ce que ton conjoint rentre, épuisé, de son travail et que vous commenciez à vous engueuler. En effet, c’est l’heure à laquelle tu as envie de sortir, ce qui est normal après avoir été seul(e) toute la journée. En devant consultant « Vous allez adopter un Smartphone et l’appeler mon ami ».

Je te conseille de trouver rapidement d’autres consultants dans la même situation de détresse sociale que toi pour vous regrouper et louer des bureaux. Ça fera plus pro si tu dois recevoir des clients, cela te permettra de confronter tes idées géniales à d’autres qui t’aideront à garder les pieds sur terre et cela te permettra de disposer de leurs compétences pour développer ton business.

6 – Plein de temps pour te remettre en question

Attends-toi à passer de sales moments à te demander si tu as fait le bon choix, à te sentir mal à l’aise toute la journée alors que tu devrais être en train de bosser au lieu de surfer sur allociné, Facebook ou Pornhub. Rappelle-toi qu’il te suffit de vendre une journée de conseil par semaine pour doubler ta rémunération mensuelle de salarié (et tripler tes impôts). L’instabilité et l’incertitude se paient (en euros et sur ta libido), donc apprends à vivre avec.

7 – Finalement les premières années, tu gagneras vachement moins

Paradoxe, tant que ton nom n’est pas connu (il faut deux à cinq ans pour se faire connaître et développer un réseau d’affaires stable, mais il suffit de quelques jours pour être dépassé) tu vas commencer par gagner moins que quand tu étais salarié.

D’abord parce que pour te faire une place sur ton marché – sans doute déjà occupé par des personnes plus compétentes que toi –, il y a de fortes chances que ton seul avantage client soit de faire une prestation gratuite (si c’est une conférence), bradée (si c’est une formation) ou payée une misère (si c’est une mission de conseil). Bref, tu vas devenir « le Chinois » des consultants déjà établis en proposant une intervention moins chère (et sans doute de moindre qualité) pour te faire un début de commencement de notoriété.

Ensuite, parce que tu devras payer toutes sortes de taxes et d’assurances dont tu ignorais l’existence alors même que tu n’auras pas encore gagné un centime.

Bien sûr, tu pourras aussi devenir auto-entrepreneur si tu ne comptes pas dépasser 32 000 € de chiffre d’affaires. Mais sérieusement qui confiera une mission de conseil à un auto-entrepreneur inconnu qui vient de se lancer ?

En dernier recours, ton conjoint deviendra ton mécène. Mais attention, ce type de mécénat a une limite dans le temps !

8 – Tu vas devenir de plus en plus intéressé à défaut de devenir intéressant

Si tu ne débutes pas ta carrière de freelance avec ton ancien employeur comme client, il y a de fortes chances que ton ambition déçue (ou l’absence de client, ou le regard atterré de ton conjoint te découvrant vautré devant la télé) te plonge dans un désespoir plus grand que si tu travaillais à mi-temps dans un système pyramidal façon Herbalife, ACN ou Karus. Il y a fort à parier que, par commodité, ta famille puis tes amis deviennent des cibles potentielles pour placer tes services en SEO (Search Engine Optimization), gestion de contenus ou conseil en images numériques.

Après avoir ratissé tes proches, avec plus ou moins de succès, tu vas te tourner vers tes concurrents. Ceux-là même chez qui tu puisses déjà tes meilleures idées et à qui tu vas maintenant essayer de piquer des parts de marché. Ces concurrents vont alors devenir tes meilleurs amis. Sait-on jamais, vu leur blog plein de commentaires et de références, ils auront peut-être quelques miettes à te confier, non ? A ce moment là, tu seras devenu l’un de ces super-consultants « internationaux top-successful » que l’on rencontre si souvent dans le métier. Ceux qui, après t’avoir expliqué pourquoi ils sont les champions du monde dans leur domaine, égrené la liste de leurs clients, usé et abusé du « name dropping », te demandent avec plus ou moins de finesse si tu n’as pas une mission à leur confier.

9 – Tu arrêteras toutes tes activités extra-professionnelles

Par fainéantise ou manque de temps, tu penseras que rester devant ton ordinateur à mettre à jour ton compte Twitter ou finir une partie de jeu en réseau est plus important que ta leçon de salsa, ton cours de piano ou ton entraînement d’haltérophilie. Tu auras payé un abonnement à une salle de sport pour rien et tu commenceras à questionner l’utilité du ménage, de la douche quotidienne et de laver ses sous-vêtements régulièrement.

10 – Tout ça pour devenir un grouillot ou un fusible

De consultant à secrétaire particulier, il n’y a qu’un pas. Tu le verras quand ton client te demandera de corriger la mise en page d’un document ou de mettre ses notes au propre. J’espère qu’à ce moment là tu auras bien négocié tes honoraires, et que tu auras demandé à être payé à l’heure plutôt qu’au forfait ! Rassure-toi, tu ne deviendras pas seulement l’esclave (de luxe) de service, tu seras aussi le bouc-émissaire que l’on blâmera pour tout échec, qu’il dépende du client lui-même ou de la conjoncture.

Sans oublier que :

– Tu n’auras plus de revenus fixes et durables et tu vas devenir tellement avare que tu garderas tes enfants toute la journée pour économiser les frais de nourrice. Donc, tu ne pourras plus bosser (à moins de les abrutir de télé) et tu en ressentiras les conséquences sur tes revenus.
– Tu perdras le goût de porter des costumes / tailleurs dont le nombre sera limité à un ou deux si tu ne travailles pas chaque jour.
– Tu seras constamment partagé entre « exécuter la mission »et « trouver une autre mission », car en exécutant la première, tu n’auras pas le temps de trouver la seconde. Attention si tu n’as qu’un seul client et qu’il décide de mettre fin à ta mission, tu es mal.

En résumé :

Il suffit de savoir compter : 10 raisons positives contre 10 raisons négatives. Si tu attendais des réponses fermes et définitives de ce livre, j’espère que tu l’as emprunté à la bibliothèque !

Alors que tu avais des rêves d’Aston Martin, de vie à la campagne dans une ferme aménagée où, depuis ton bureau, tu pouvais voir tes enfants grandir, et passer du temps avec la femme/l’homme de ta vie, te voilà plutôt parti pour devenir en quelques mois un clochard du conseil, un mendiant de la missionetl’esclave textuel de ton blog.

Ton addiction au café, au tabac et à l’alcool s’aggravera encore quand ton conjoint t’aura quitté pour son responsable hiérarchique. Tu seras obligé de déménager dans un deux pièces qui transformera ton bureau en chambre et vice-versa. Il n’y aura pas long avant que le monde virtuel du poker en ligne, de Candycrush ou de Facebook ne te fasse décrocher définitivement du monde réel.

Mais voyons les choses de façon positive : plus de chef pour te mettre le stress. En devenant freelance, tu fabriqueras toi-même ton ulcère : « Comment vais-je payer mon loyer ce mois-ci ? Quand arrive ce chèque que j’attends depuis trois mois ? Est-ce que mon client va signer la propale qui me permettra de travailler le mois prochain ? »

Et inutile d’espérer oublier ton travail en rentrant chez toi puisque ton bureau, eh ben… il est chez toi !

A suivre : Partie 2/7 – Devenir un freelance visible 
Partie 3/7 – Choisir son style de freelance
Partie 4/7 – Développer son expertise de consultant
Partie 5/7 – Trouver son premier client
Partie 6/7 – Réussir sa première mission 
Partie 7/7 – L’avenir du consultant Freelance… »Le Naked Consulting »